Le dernier duc d'Occident ou la nostalgie d'un pays
rêvé
Laurence Boudart
Universidad de Valladolid
À l'aube de la Renaissance, Charles le Téméraire poursuit un rêve, une chimère: il veut unir le duché de Bourgogne des Pays-Bas aux Alpes, et en faire un royaume fort, entre la France et l'Empire. Cette folle entreprise ne verra jamais le jour.
Plus près de nous, au XXe siècle, de nombreux auteurs francophones, belges en particulier, ont été séduits par ce personnage mythique, passionné et passionnant à la fois, au point de le faire renaître dans plusieurs de leurs ouvrages. Citons le Suisse Paul Budry (Le Hardi chez les Vaudois), les Belges Edmond Picard (La joyeuse entrée de Charles le Téméraire: Bruges, 1467, Gand: Drame en sept tableaux), Georges Sion (Charles le Téméraire), Émile Verhaeren (Le Téméraire dans Toute la Flandre), Gaston Compère (Je soussigné Charles le Téméraire, duc de Bourgogne et Le dernier duc d'Occident) et René Kalisky (Charles le Téméraire ou l'autopsie d'un prince).
Il sera ici question en particulier de ces deux derniers auteurs, Compère et Kalisky, qui, malgré des styles d'écriture bien différents, nous permettent de nous interroger à la fois sur le choix commun du héros, et sur cette caractéristique dont font preuve de nombreux auteurs belges de sans cesse frôler le surnaturel, le fantastique.
Quant au choix du personnage, il s'agira de donner des pistes de réponses à la question suivante: pourquoi cette obsession pour le dernier duc d'Occident chez des auteurs, belges pour la plupart, qui savent ce que signifie vivre dans un pays de «l'entre-deux», entre une culture française omniprésente et d'indéniables spécificités belges?