Du discours épilinguistique aux pratiques sociales,
la question de la norme linguistique en Belgique francophone
André Bénit
Universidad Autónoma de Madrid
Comme maints francophones périphériques, beaucoup de Belges francophones vivent difficilement leur langue. C'est du moins ce qui ressort de leur discours épilinguistique: «Quand les francophones belges parlent de leur langue, ils font souvent preuve d'un certain complexe par rapport à leurs voisins français, à qui ils attribuent une meilleure variété de langue et une plus grande habileté verbale», observe Marie-Louise Moreau. Les récentes études sociolinguistiques signalent pourtant qu'à l'instar des locuteurs vivant dans des communautés frappées par un sentiment d'insécurité linguistique, la plupart des Wallons et des Bruxellois ne hiérarchisent pas les usages selon un critère géographique mais selon un critère essentiellement social; ceci les amène, à l'heure de définir leur norme de prestige, à témoigner une certaine préférence pour une variété autochtone, celle de la bourgeoisie culturelle belge. Toute politique linguistique, dont l'objectif prioritaire doit être de rendre confiance aux nombreux citoyens en mal et en quête de légitimité et de confort langagier, ne peut ignorer ce fait de culture.